jeudi 16 août 2007

Chronique gauloise no 23

Sainte-Jeanne-d’Arc, priez pour nous!

(Rouen, le 30 juin 2007) – Guillerets et joyeux, nous roulons maintenant vers la Normandie, fiers d’avoir vaincu Paris et ses armées de véhicules cabossées et de motocyclettes folles. Nous nous sentons comme de véritables conquérants en quête d’une nouvelle ville à s’emparer. Si Paris, la capitale et la métropole du royaume de France n’avait pu freiner notre course, comment Rouen, la ville de Jeanne-d’Arc et petite capitale de la Normandie, pourrait-elle nous résister?

Après environ deux heures de route, nous voici enfin à proximité de « La ville aux cent clochers ». Selon moi, dans une vingtaine de minutes nous serons arrivés à l’Étap Hôtel Centre Rive-Gauche, notre destination ultime pour aujourd’hui. Mais à deux kilomètres de la ville, nous nous gourons d’embranchement à une intersection en « Y » et dévalons une longue pente avec des courbes à ne plus finir. Nous venons de perdre le fil de l’itinéraire prévu sur nos feuilles de route.

Je pourrais toujours faire demi-tour, revenir sur mes pas mais je n’ai pas envie de me lancer dans la conquête du mini-Éverest que nous venons de descendre. Et puis, Rouen est tout juste là à côté, aussi bien y aller tout de suite. D’ailleurs, si je me souviens bien, notre itinéraire prévoyait l’entrée à Rouen par la rive droite de la Seine sur une voie autoroutière et c’est exactement ce qui se présente devant moi. Alors, advienne que pourra!

Je n’ai rien d’un conquérant finalement…

Si le grand Jules César a pu déclarer « Je suis venu, j’ai vu et j’ai vaincu » -- Veni vedi vici pour les latinophiles – notre entrée dans la ville de Rouen ressemble plutôt à « Je suis venu comme j’ai pu, j’ai vu que nous étions perdus, et j’en ai plein l’cul! » (Oups! Excuse-moi, vieux Jules…).

Je sais que je dois traverser la Seine pour aller sur la rive gauche, je sais le nom du pont, mais il y en a au moins quatre et pas une maudite indication pour nous dire lequel est lequel. Nous nous retrouvons dans un petit tunnel et je me rends compte que nous sommes maintenant en train de sortir de la ville en direction… de la Belgique je crois! Bon, peut-être pas, mais compte tenu de notre état d’égarement, tout était possible. On m’aurait dit que j’arrivais au Zimbabwe et je n’aurais pas eu l’ombre d’un doute!

Je réussis tant bien que mal à nous ramener vers le centre-ville. Mentalement, j’essaie de mettre en marche mon GPS interne pour nous localiser géographiquement. Comme je l’ai mentionné dans la chronique précédente, j’ai tellement étudié les cartes avant de partir que je suis en mesure de me situer par rapport aux principaux attraits d’une ville. À Rouen, mon point de repère principal, c’est la cathédrale qui, heureusement, se voit de loin!

Je me dirige alors vers ce que je crois être le bon pont, selon un exercice de haute voltige intellectuelle utilisant la technique de la triangulation spatiale (ça vous impressionne, hein?). J’emprunte le boulevard Jeanne-d’Arc – priez pour nous pauvres égarés – qui devrait normalement nous permettre d’atteindre le pont du même nom. Bon, il y a effectivement un pont, je suppose que c’est celui de Jeanne, et puis de toute façon, il faut traverser la Seine. Advienne que pourra!

Vivement la libération!

Ce n’est pas parce que nous nous retrouvons maintenant sur la rive gauche de la Seine que nous sommes moins perdus, bien au contraire : actuellement, la gauche, la droite, le devant, le derrière, le haut et le bas n’ont plus de sens, ni de bon sens. Si, de l’autre côté, je pouvais me guider en me servant de la cathédrale, de ce bord-ci, y’a rien, rien de rien, qui peut m’aider.

Même si l’homme qui est en moi se refuse d’aller demander son chemin – quand même, j’ai mon orgueil de mâle – je n’ai pas le choix. Je m’arrête donc à une station-service – ou un concessionnaire d’automobile, je ne sais plus très bien – et demande où se trouve l’avenue de la Libération (ce n’est pas une blague, c’est son vrai nom!). Mon bon samaritain lève le doigt en direction du grand boulevard qui s’allonge devant nous à droite. « C’est là », me dit-il, en levant les yeux au ciel par dépit. Je sais, je sais, j’ai honte, mais je ne suis pas d’ici… (J’aurais dû demander le renseignement en anglais, au moins on m’aurait pris pour un amaricain!). Tout ça pour dire que si j’avais continué ma route cent mètres de plus en ligne droite, j’y étais et j’aurais réussi, comme un homme, un vrai, à me rendre à destination sans avoir eu à demander mon chemin.

Penaud, et le taux de testostérone à son plus bas, je remonte dans l’auto pour dire à ma blonde, le plus sereinement possible, que, finalement, j’ai un maudit bon sens de l’orientation car nous n’étions pas perdus pantoute, l’hôtel est tout juste là bas!

Faut ben se consoler comme on peut…

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